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Devenir un citoyen pacifié et pacifiant

Dernière mise à jour : 1 avr. 2020

Mardi 24 mars, Thomas d’Asembourg, formateur certifié en communication non violente, auteur et conférencier, présentait lors d’une conférence sur Internet, les freins et les conditionnements qui empêchent « les êtres à devenir plus humains ». En ces temps de confinement imposé, il semble important que son message soit entendu. Voici un essai de retranscription qui résume les idées, tout en gardant le plus possible les mots du conférencier.


"Si l’on veut la paix dans le royaume, faisons la paix dans la province. Si l’on veut la paix dans la province, faisons la paix dans la ville. Si l’on veut la paix dans la ville, faisons la paix dans le quartier. Si l’on veut la paix dans le quartier, faisons la paix dans la maison. Si l’on veut la paix dans la maison, faisons la paix à l’intérieur de nous." Confucius


Cette réflexion, qui date de 2500 ans, est plus que jamais d’actualité. Nous avons besoin d’apprendre à pacifier cet espace d’humanité que nous sommes. Cela demande certains apprentissages et certaines pratiques pour retrouver une façon d’être au monde qui soit "pacifiante", parce qu’un être pacifié devient un être pacifiant par son attitude et ce qu’il dégage….

Il semble impossible de transformer nos façons de faire sans transformer nos façons d’être.

"Si l’on fait ce que l’on a toujours fait, on obtient ce que l’on a toujours obtenu." Pavlov

Par conséquent, il est évident que si je veux obtenir autre chose dans mes relations à mon conjoint, mes enfants, mes ados, mes collègues, mes amis, à la Terre, aux ressources, à la nature…, je dois faire autrement. Or, comment faire autrement si l’on pense de la même façon ?

La seule façon de faire autrement pour obtenir autre chose est donc de revisiter le système de pensées pour que cela soit bénéfique dans les relations aux personnes qui m’entourent et à mon environnement.

Bien évidemment, ce pivotement à l’intérieur de soi-même n’est pas très confortable. Ce travail d’intériorité et de remise en question est un travail de longue haleine mais salutaire et essentiel.

Pour comprendre tout cela, nous allons voir un certain nombre de programmations qui explique ce que l’on vient d’évoquer.

1ère programmation collective : la culture du malheur


C’est l’habitude de voir la vie comme une tragédie. On peut comprendre qu’on se soit laissé plomber par des siècles de guerre, guerre encore présente partout dans le monde, la mortalité infantile, le manque d’hygiène, etc.

Bref, la conscience collective est marquée par une histoire peu reluisante qui nous fait dire "on n’est pas là pour rigoler, on est là pour en baver…"

Par conséquent, si on a cette arrière-pensée, il est difficile d’être pleinement heureux. C’est ce qu’on appelle un mécanisme d’auto-sabotage qui compromet ce vers quoi nous aimerions pourtant tant aller.


Citons l’exemple de la personne, qui au repas de noël, alors que toute la famille devrait être enchantée d’être réunie, va ressortir le dossier désagréable et provoquer la dispute.


Pourquoi, lorsqu’on n’est pas d’accord, on se sent obligé d’argumenter, de s’énerver au lieu d’écouter tranquillement ?

C’est l’habitude de la culture du malheur : on est plus habitué à nous lamenter, à nous plaindre et à nous quereller qu’à nous entendre, à nous réconcilier et à nous enchanter d’être là.

Il est donc temps de changer cette habitude et de passer de la culture du malheur à la culture de l’enchantement.

Il s’agit de passer plus de temps à se réconcilier, à se témoigner mutuellement de la gratitude, à être heureux d’être ensemble, en bonne santé et en vie.


Toutes les traditions convergent en nous disant que nous sommes là pour trouver une joie profonde et un état de paix intérieure stable, transportable et contagieux que l’on porte avec soi à travers les difficultés, car nous ne sommes pas dans un « monde de bisounours ».

Contagieux, car c’est le bénéfice citoyen : les personnes qui développent cette paix intérieure la manifeste autour d’eux. Pensons à des gens comme le Dalaï Lama, Mère Térésa ou Nelson Mandela qui rayonnent et qui apaisent juste en les regardant et en les écoutant.

2ème programmation : l’habitude de voir les rapports humains comme des rapports de force


Celle-ci découle de la première. Ce type de rapport de force, de pouvoir peut bien se passer tant que nous sommes d’accord. Mais dès lors que nous ne le sommes plus, une tension s’installe et nous voilà en train d’argumenter pour avoir raison, ou de fuir dans notre grotte.

Pour être plus clair, soit on sort le gourdin pour frapper celui qui a tort, soit on achète la paix en abdiquant, mais jamais il n’y a rencontre.


A partir de ce jour, observez à chaque fois que vous êtes en désaccord avec votre amoureux, votre ado, votre collègue, votre vieille maman…

Vérifiez si ce qui circule en vous est une douce empathie bienveillante pour cet humain que vous chérissez et un grand goût d’accueillir sa différence ! Ou bien est-ce une petite palpitation au niveau du cœur, un souffle un peu plus court, une petite montée d’adrénaline qui vous fait préparer le gourdin à asséner sur sa tête ou la fuite dans votre grotte pour éviter le conflit ?


C’est une habitude surprenante et pourtant bien réelle, n’est-ce pas ? Une habitude qu’il est tout à fait possible de déprogrammer.

Il n’y a aucune raison de ne pas goûter une jubilation à se rencontrer dans nos différences et surtout au-delà de nos différences ; ce qui fait que l’on participe à la vie et au vivant !

Nous avons besoin d’apprendre de nouvelles approches pour démanteler ça.

3ème programmation : l’habitude de vivre les rapports humains sous l’axe de la méfiance


"Attention ! C’est nouveau ! C’est différent ! Ces gens ne pensent pas pareil ! Ils n’ont pas les mêmes références ni les mêmes valeurs… est-ce qu’on va s’entendre ?"


On vit donc plutôt dans la méfiance. Ce qui amène des mécanismes de contraction-fermeture plutôt que des mécanismes d’expansion, d’ouverture et de confiance.

Or, aujourd’hui, nous nous rendons bien compte que nous allons vers de plus en plus de nouveautés. Nous sommes face à un tissage et un métissage de populations que l’humanité n’a pratiquement jamais connu. Même si l’exil et l’exode ont existé de tout temps, les migrations de masse auxquelles nous assistons et auxquelles nous allons assister, pour des enjeux de réchauffement climatique qui n’échappent plus à personne, vont faire que nous avons profondément besoin de cheviller en nous l’accueil de la différence, l’ouverture à la nouveauté et donc la confiance en notre capacité à se rencontrer à d’autres endroits que nos habitudes et nos zones de confort.


Evidemment, tout cela n’a rien de « bisounours » : c’est du boulot ! Ça s’apprend petit à petit et cela demande du temps pour s’y préparer, de la même manière que l’on doit se préparer pour pratiquer le football ou une langue étrangère. Personne n’imagine devenir un as en maths, un pro de guitare ou de mécanique en quelques heures ! Nous savons tous qu’il faudra des mois voire des années pour avoir une aisance et une maîtrise de ces disciplines.

On s’y implique, on prend des cours, on se fait conseiller, on travaille… La discipline s’instaure et avec le facteur Temps, petit à petit. Pour la paix, c’est pareil !

Arrêtons de croire que c’est une utopie : c’est plutôt un argument pour éviter de se mettre au travail !


Si on sait faire la guerre, c’est qu’on s’y discipline ! Si l’armée est capable de donner le commandement d’un peloton à un jeune militaire avec 14 mois de formation, de lui donner la confiance de toute une nation parce qu’il a suivi un bon entrainement, alors imaginez la puissance qui est en nous si nous faisions 14 mois d’exercices de pacification ! Avec la possibilité de s’entraîner, de se former, de suivre des cours et d’être accompagné sur ce cheminement !

Nous avons un pouvoir de transformation qui est aussi considérable que négligé.

Nous ne pensons juste pas à mettre notre attention, nos compétences, notre intelligence, notre sensibilité, notre puissance au service de la paix.


Il est temps que nous instaurions des pratiques de la paix depuis la maternelle et dans toutes les écoles pour que tous les enfants ait l’occasion d’apprendre : "Comment je me sens ? Qu’est-ce que ça dit de moi ? Quelles sont mes joies, mes élans de vie ? Quels sont mes talents que je peux mettre joyeusement, avec le soutien des adultes, au service de la vie communautaire ?" mais aussi "Qu’est-ce qui m’attriste, me peine, me chagrine, me rend seul, impuissant, ou en rage ? et que j’ai besoin de comprendre avant de faire payer ma colère aux autres ?".

Nous dépassons les enjeux du développement dit personnel, terme trop réducteur aujourd’hui.

Il s’agit bien là de développement social durable ! Une façon d’entrer dans la transition en revisitant les automatismes, les habitudes et les programmations qui nous font réagir (action/réaction) plutôt que d’agir avec discernement.

Il est temps de créer des rapports de confiance, dès le plus jeune âge, de sortir de la compétition, de la célébration du meilleur qui a gagné face à tous ceux qui ont perdu et qui nourrissent de l’amertume.


Il est temps de créer, dès l’enfance, des rapports de collaboration, d’entraide, d’empathie, d’intelligence collective où chacun sent que sa couleur est absolument magnifique et bienvenue pour la fresque que l’on va dessiner ensemble.


4ème programmation : la culture du "je"/"tu"


Enfin, parmi toutes les programmations, il y en a une qui est prégnante un peu partout : celle du "je/ moi", trop souvent égoïste, face au "tu/ vous" accusateur voire menaçant.

Et nous avons oublié le "nous", le "nous", fécond, solidaire, partagé, partageant, empathique, tribal voire primaire.

S’il y a de l’humanité sur cette planète, c’est qu’il y a eu du "nous" dès l’origine, pour la création d’un premier couple donnant naissance à une progéniture, pour la création de toute une civilisation, pour construire, inventer les arts, la culture… Voilà pourquoi il est urgent de retrouver le sens du « nous ».


Pour conclure, si l’on veut se défaire de ces programmations et de ces habitudes, il faut les mettre comme objectif : "Je ne veux plus de rapport de force, plus de rapport de méfiance, je ne veux plus "de je/ me/ moi " face au "tu/ te/ toi", je veux chercher du "nous"."

Tout cela changera bien évidemment la nature de toutes vos relations.


Si cela n’empêchera d’avoir des querelles, cela nous apprendra la capacité de rendre les conflits féconds. Cela se fait par l’écoute, la capacité d’accepter qu’on n’est pas obligé d’être d’accord sur tout, de ne plus confondre désaccord et désamour et par l’introduction, dans le processus de traversée des conflits, du facteur Temps.


Laissons-nous le temps de réfléchir : on n’est pas obligé de donner une réponse dans l’instant. Parfois, il faut que la réflexion mûrisse, des deux côtés ! Vous constaterez très vite par vous-même que ce Temps est bénéfique à la résolution des conflits et que souvent, ce n’est ni votre proposition ni la proposition de l’autre qui est la solution mais une troisième qui rassemble les énergies des deux.

Personne ne peut vous dire ce que vous avez à faire, vous êtes seul l’artisan qui décidera, ou pas, de faire de votre vie une œuvre d’art.

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